ExpoPatrimoine et culture: Vasarely au Château de Sancerre

Expo / Patrimoine et culture: Vasarely au Château de Sancerre
Coulisse de l’exposition: le Château de Sancerre Photo: Gatien Baron 

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C’est une première dans le Sancerrois: le Château, au cœur de la ville, avec une vue panoramique sur les vignes, dans l’écrin d’un conte de fées, n’avait pas ouvert ses portes depuis 150 ans. Cet été, nous pouvons le visiter, y monter au gré d’un jardin botanique exceptionnel. C’est l’occasion aussi d’y admirer quelques œuvres de Vasarely.

La restauration permet de réhabiliter quelques bâtiments d’exception, le Château de Sancerre et son jardin en font partie. L’Histoire est au rendez-vous, et il est fascinant de découvrir les strates de temps qui ont permis sa renaissance. Pour y accéder, nous pénétrons dans un jardin fort de trente ans de travail délicat, subtil. Les essences se marient, au point que nous sommes à la fois au cœur du Sancerrois mais également dans un parc exotique. Accueillis par un cèdre du Liban de 300 ans, des cèdres de l’Atlas de 150 ans, nous déambulons au gré d’allées offrant un magnifique point de vue sur la vallée de la Loire. Quelques haltes nous permettent de découvrir, entre autres, un poivrier du Sichuan, un jasmin d’hiver, et d’autres délicatesses, en cascades savantes.

       
        Photo: Gatien Baron 

L’histoire en palimpseste

Nous arrivons au Château, devancé par la Tour des Fiefs. Une association sancerroise se voue à sa restauration. Que l’on imagine, c’est le seul vestige, à peu près intact dans son architecture, du château féodal de Sancerre. Erigée au rang des monuments historiques depuis 1927, elle a été bâtie entre 1390 et 1398. Sans être un donjon, elle était néanmoins un endroit de surveillance, vraisemblablement comme les autres tours, au nombre de cinq, aujourd’hui disparues. Cette Tour des Fiefs est restée debout, lorsque le château féodal a été démantelé sur ordre de Louis XIII, mais son escalier à vis a été détruit pour empêcher tout accès. En 1856, un escalier en bois a été posé, à la demande d’Armand de Crussol d’Uzès, pour profiter de la vue panoramique. Car nous contemplons une mer de vignes depuis un monticule rocheux, avec au loin, comme pour un tableau de la Renaissance, pour signifier la perspective atmosphérique, les méandres de la Loire.

Nous ne saurions ici faire l’impasse sur les siècles, la Tour des Fiefs est là pour nous les rappeler. Avant de contempler le „nouveau“ Château de Sancerre, un rappel s’impose. Le Château féodal a été l’une des plus imposantes forteresses du Moyen Âge, elle a joué un rôle majeur pendant la guerre de Cent ans. Place forte imprenable, il servait de refuge aux habitants de la vallée. En 1429, le futur Charles VII et Jeanne d’Arc y ont séjourné, le château occupant alors une position stratégique dans la lutte contre l’occupation anglaise.

En 1573, pendant les guerres de religion, Sancerre étant une ville protestante, le château est déserté par les seigneurs. La ville fait l’objet d’un siège du 13 janvier au 18 août 1573 et capitule à cause de la famine. Les remparts sont démantelés. En 1621, les Sancerrois se rebellent à nouveau contre le pouvoir. Le Prince de Condé, Henry II de Bourbon-Condé, est chargé par le roi de démanteler le château. Voici sur quelle mémoire repose le nouveau château de Sancerre.

     
      Photo: Gatien Baron 

Quant à la suite, Mathilde de Crussol d’Uzès, fille du Comte Roy, hérite en 1874 des terres achetées par son père en 1794. Elle décide de la construction d’un nouveau château, en harmonie avec les vestiges, et principalement la Tour des Fiefs. Apparaît un édifice élégant et délicat, inspiré des styles néo-gothique et néo-Renaissance. Ainsi naît un lieu enchanteur et paisible, baigné de lumière naturelle. En 1919, la famille Marnier-Lapostolle acquiert le château, qu’elle garde jusqu’en 2023. Celui-ci est inhabité depuis les années 2000.
Pour la première fois depuis 150 ans, le voici ouvert au public, avec une exposition des œuvres de Vasarely qui se marient fort bien avec le lieu.

Un dialogue incessant

Nous sommes d’emblée accueillis dans le parc par une sculpture de Vasarely, dans un dialogue majeur avec l’architecture des lieux. Et l’on voit comment les préoccupations de Vasarely de sortir du cadre étroit de la peinture de chevalet, pour proposer une œuvre hors les murs, in situ, imposante, dans des registres optiques alors inédits, a également comme ambition de répondre au lieu qui l’accueille. Oeuvre à la fois légère et imposante, en résonance parfaite, cette exposition allie magnifiquement le patrimoine et la culture.

Fils spirituel du Bauhaus, avec ce que cela comporte d’implications sociales et urbaines, Vasarely émigre de Hongrie en 1930 et dirige une agence de publicité jusqu’en 1956. Un séjour à la mer, en 1947, la contemplation des galets, le confirment dans l’idée que tout n’est que vibration. Vasarely devient un pionnier de l’art optique. La dynamique de la vision, la plasticité de ses œuvres, le détachent des contingences du tableau. Il renoue dans son rapport à la ville. Son art, comme celui, à l’époque d’Alexander Calder, Marcel Duchamp, Jean Tinguely, entre autres, se fonde sur la notion „d’œuvres transformables“.

Les critiques d’art Pontus Hulten et Roger Bordier précisent les objectifs de „l’œuvre transformable“. Ils l’évoquent en des termes de mobilité, de mouvement optique, de son interaction avec le spectateur. Celle-ci peut être indéfiniment recréable. Ainsi l’univers de Vasarely entre en des vibrations puissantes avec le château de Sancerre. La lumière, les jeux optiques, la monumentalité que dégagent de telles œuvres, leur confrontation n’en finissent pas d’imprégner les visiteurs. L’art est souverain et sa résonance, infinie, avec les lieux qu’il peuple.

      
       Photo: Gatien Baron 

Victor Vasarely au Château de Sancerre

Exposition Victor Vasarely à Sancerre — Château de Sancerre (lechateaudesancerre.fr)
Jusqu’au 22 septembre 2024