Des propos anti-Mitterrand de Raphaël Glucksmann agitent les socialistes

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Raphaël Glucksmann, tête de liste du PS, cause des soucis pour le Parti socialiste après avoir critiqué François Mitterrand pour son rôle dans la crise rwandaise en 1994.

De notre correspondant Bernard Brigouleix, Paris

Nouveau souci pour le Parti socialiste dans la campagne pour les élections européennes: des propos de sa tête de liste, Raphaël Glucksmann – qui n’appartient pas au PS mais lui prête le renfort de sa petite formation de gauche, Place Publique, en échange de la première place – au sujet du rôle de François Mitterrand dans la crise rwandaise il y a 25 ans, suscite une vague d’indignation chez les anciens ministres du président défunt.
Sont en fait incriminées deux déclarations de M. Glucksmann allant dans le même sens, et sur un ton particulièrement féroce pour la mémoire et l’action passée du fondateur du PS. Dans la première, datant du mois de janvier mais exhumée seulement maintenant, il aurait affirmé: „Mitterrand a porté de la manière la plus radicale et la plus abjecte la politique de la France au Rwanda.“ Plus récemment, le 6 avril, en marge d’un de ses meetings, à Toulouse, il présente l’ancien président – qui reste la grande figure de référence des socialistes français – comme „complice du génocide au Rwanda“ lequel avait fait environ 800.000 morts parmi les Tutsis massacrés par les Hutus entre avril et juillet 1994.

Des plaintes contre Glucksmann

23 anciens ministres de François Mitterrand, et non des moindres: Roland Dumas, Hubert Védrine, Jack Lang, Michel Charasse, Elisabeth Guigou, Edith Cresson, Bernard Cazeneuve (qui fut, lui, le dernier premier ministre de François Hollande), et bien d’autres encore, viennent de demander à Olivier Faure, l’actuel premier secrétaire du PS, dans une lettre dont le texte a rapidement „fuité“, de „convaincre Raphaël Glucksmann de retirer ses insultes et accusations infondées envers François Mitterrand“, et „en cas de refus, de trouver les formes appropriées pour désavouer ses propos“.

Ajoutant: „Rien, absolument rien, ne peut justifier les accusations de complicité de génocide relayées par M. Glucksmann, alors qu’il s’exprime aujourd’hui au nom des socialistes, et alors que la France a au contraire été le seul pays, dès le feu vert donné par l’ONU, à mener une opération humanitaire en 1994, c’est-à-dire pendant le génocide, pour sauver des vies, pendant que le monde entier restait indifférent.“ „Que celui qui porte la liste du PS pour les élections puisse dire ça sur Mitterrand est ahurissant“, s’est aussi indigné l’un des signataires.

Au plus mauvais moment …

Cette affaire surgit au plus mauvais moment tant pour le PS que pour la petite formation de M. Glucksmann, et vient conforter ceux qui, chez l’un comme chez l’autre, manquaient pour le moins d’enthousiasme à l’égard de cette attelage singulier, où les socialistes renonçaient, pour la première fois en matière européenne, à mener le combat sous leur propre drapeau – ce qui avait valu à Olivier Faure d’amères critiques de certains militants. Quant à Place Publique, ce micro-parti aurait perdu, selon la rumeur (pas vraiment démentie par Raphaël Glucksmann) à peu près la moitié de ses responsables le mois dernier, notamment en raison de sa gestion jugée trop „verticale“.

Mais plus que tout, ces soubresauts, rapidement devenus publics, risquent fort d’achever de ruiner les chances des socialistes, qui misaient encore sur cet attelage contesté pour préserver quelques sièges au Parlement européen, en dépassant la barre fatidique de cinq pour cent des suffrages.

Un chiffre que les derniers sondages, avant que la lettre des 23 anciens ministres ne soit publiée, ne leur accordaient que tout juste. Décidément, la gauche française, déjà laminée – comme la droite classique, d’ailleurs – par la vague macroniste, ne parvient manifestement pas, pour l’instant, à surmonter ses divisions, y compris lorsqu’une partie d’entre elle cherche à réamorcer un processus unitaire.

Et alors que les partisans du chef de l’Etat sont pourtant réduits à des scores relativement décevants pour eux dans les enquêtes d’opinion face à la liste lepéniste (Tageblatt du 13 avril), au point que l’homme de l’Elysée a décidé de faire figurer sa photo sur leurs affiches électorales. Une grande première aussi pour un scrutin européen … et un pari point nécessairement gagnant par les temps actuels.