FranceLa candidature avancée par la gauche est écartée par Macron, qui temporise

France / La candidature avancée par la gauche est écartée par Macron, qui temporise
Lucie Castets a demandé au président Emmanuel Macron de la nommer à Matignon Photo: Ludovic Marin/AFP

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Le Nouveau Front populaire avait enfin trouvé, juste avant qu’Emmanuel Macron prenne la parole mardi soir à la télévision, et après seize jours d’âpres négociations, un nom à proposer pour Matignon: celui d’une haute fonctionnaire de la Ville de Paris, Lucie Castets.

En fait, les quatre partis de gauche qui le composent comptaient même l’imposer au chef de l’État, sommé de la nommer premier ministre sans attendre. Cet espoir aura cependant été de très courte durée.

Tout se passe décidément comme si chaque jour qui passe devait ajouter à la confusion générale, et compliquer encore la situation politique de la France. Pourtant, pour le NFP, sa trouvaille de dernière minute aura tout de même ressemblé, une heure durant, à une possible éclaircie dans ce ciel politique particulièrement chargé. Elle était évidemment destinée à accroître la pression sur l’homme de l’Elysée et le priver de l’argument selon lequel même la gauche, en principe unie, ne parvenait pas à s’entendre sur une personnalité susceptible de diriger le futur gouvernement; mais justement: fût-ce en faveur d’une parfaite inconnue, elle montrait qu’une entente était finalement possible.

C’était d’autant plus remarquable que si Mme Castets, qui s’est aussitôt déclarée effectivement candidate et a demandé au président de la République de la nommer à Matignon, possède un bon profil – proche de l’aile sociale-démocrate du PS, elle a milité dans différentes associations de gauche et a effectué dans la haute administration, depuis sa sortie de l’ENA, un parcours sans faute – elle présente aussi d’autres caractéristiques qui auraient certainement valu, quelques jours plus tôt, un refus catégorique des mélenchonistes, hostiles par principe à toute proposition venant du PS ou des Verts.

En outre, Mme Castets, après avoir participé à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, dirige les Finances de la Ville de Paris au sein de l’équipe de la maire socialiste Anne Hidalgo. Or, il s’agit là d’un secteur de la haute administration municipale particulièrement critiqué: la dette publique de la capitale a considérablement crû récemment. Sans doute les macronistes seraient-ils mal placés pour lui en faire grief, compte tenu de l’état dans lequel ils vont eux-mêmes laisser les finances du pays du point de vue de la dette! Mais justement: d’aucuns pourraient hésiter à en confier la gestion à quelqu’un qui, quelles que soient ses qualités intellectuelles, n’a pas craint d’adopter le même genre de politique à l’échelon local. Le tout en donnant l’impression qu’à une certaine technocratie issue de l’ENA, fort mal vue d’une partie importante de l’opinion, va en succéder une autre.

„La question, c’est: quelle majorité?“

Mais de toute façon, à en juger par les propos présidentiels de lundi soir, le problème ne se posera pas – en tout cas dans l’immédiat. M. Macron a en effet insisté sur le fait que les Jeux olympiques allaient imposer une „trêve politique jusqu’à la mi-août“, aucune nomination d’un nouveau premier ministre et de son gouvernement n’étant envisageable avant. Et que, même après, „le sujet n’est pas de retenir un nom donné par une formation politique“, au demeurant „dépourvue de majorité quelle qu’elle soit“. La question, a-t-il estimé, c’est: „Quelle majorité peut se dégager à l’Assemblée pour qu’un gouvernement puisse faire passer des réformes, un budget, et faire avancer le pays?“

Significativement, M. Macron a énuméré, parmi les leçons que les électeurs avaient voulu donner au pouvoir, des exigences qui relèvent plutôt de la sensibilité de la droite: davantage de sécurité et de justice, la maîtrise de l’immigration, etc. Ce qui rejoignait à peu près les demandes formulées peu auparavant par la Droite républicaine (le nouveau nom de LR), laquelle va répétant que sa „plate-forme législative“ ne la conduira pas pour autant à adhérer à une nouvelle majorité avec les centristes.

Le cœur de cet imbroglio politique étant qu’aucun des trois grands blocs de l’Assemblée – gauche, centre et droite modérée, extrême droite – ne dispose à soi tout seul d’une majorité absolue, ou même simplement proche des 289 sièges fatidiques, comme c’était le cas sous la précédente législature. Et qu’aucun d’entre eux ne semble prêt à gouverner avec l’un des deux autres, en tout cas dans son entièreté. Quant à la vraie/fausse „trêve“ des JO, avec une ex-majorité qui va évidemment continuer à chercher son salut, une gauche qui clame sa frustration et son exaspération, et un RN ravi de souffler sur les braises de la discorde, on voit mal comment elle pourrait déboucher d’ici quelques semaines sur une coalition de gouvernement viable. Or dans guère plus d’un mois, il faudra commencer la préparation du budget 2025.